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La Carte des Mondes Perdus
De Piri Reis à Mercator, d’Hapgood à l’Atlantide: quand la lithosphère garde les stigmates du passage des pôles.
Il existe des cartes qui ne décrivent pas seulement la Terre, mais l’âme. La carte de Piri Reis, tracée en 1513, est de celles-là. Elle semble montrer non pas un continent gelé, mais une mémoire oubliée, une réminiscence des temps où les pôles n’étaient pas là où ils se dressent aujourd’hui. Comme si l’océan avait gardé en son sein l’écho d’une géographie disparue, transmise de peuple en peuple, d’âge en âge.
La carte polaire de Mercator : le Nord comme matrice
Un demi-siècle plus tard, en 1569, Gérard Mercator publie son immense Atlas, accompagné d’une carte singulière du pôle Nord. On y distingue une île circulaire entourée de quatre fleuves, convergeant vers un tourbillon central dominé par une montagne noire, la Rupes Nigra, considérée par certaines traditions comme l’axe du monde.
Ce dessin n’était pas une simple fantaisie : Mercator affirmait tenir ses sources d’explorateurs oubliés et de manuscrits disparus. Sa carte reprend la logique de la roue solaire nordique et de l’Atlantide platonicienne : une géométrie de cercles et de flux, où le centre est à la fois source et abîme.

Gérard Mercator, « World Map », 1569 — Feuillet 13.
Reproduction d’un feuillet de la mappemonde murale de 1569, issue de l’exemplaire conservé à Bâle.
Source : Wikimedia Commons ([PD]). Scan réalisé par Wilhelm Krücken.Piri Reis et Mercator, miroir du Sud et du Nord
Ainsi, les deux cartes forment un diptyque :
- Piri Reis conserve le souvenir d’un Sud englouti,
- Mercator révèle un Nord axial, centre oublié du monde.
Entre elles se joue une polarité : le monde submergé et le monde vertical, l’océan et la montagne, la mémoire du passé et l’éternel centre.

La roue des pôles
Leur unité apparaît lorsqu’on les lit à la lumière de Charles Hapgood et de sa théorie des pôles errants. Si la lithosphère bascule, le Nord devient Sud, le Sud devient Nord, et la Terre tourne comme une roue cosmique. Piri Reis et Mercator n’auraient transmis que deux reflets d’une même vérité : la Terre est traversée par un axe vivant, dont les pôles sont les portes d’entrée.
Les pôles errants et la coquille du monde
Pour Hapgood, la lithosphère, cette peau fragile, glisse sur le manteau terrestre. Alors les pôles se déplacent, les climats se métamorphosent, les royaumes s’engloutissent. La science moderne a rejeté cette idée, mais elle garde une force symbolique : elle dit que le monde est vivant, mouvant, jamais figé.
On pourrait comparer ce glissement à la peau d’une orange se mouvant sur sa pulpe : la croûte terrestre enveloppe un noyau vibrant. Lorsque l’un de ses fragments demeure trop longtemps sur un pôle, il est happé et morcelé par l’effet d’aspiration de l’abîme, ce Ginnungagap dont parlent les mythes nordiques.
Si la planète est un tore, elle en épouse la géométrie : percée en ses deux pôles comme une perle, laissant circuler des flux d’aspiration et d’expiration. De cette vision naît une promesse : ces ouvertures pourraient un jour nous révéler la clé de l’énergie libre, comme l’explorent des chercheurs contemporains tels Nassim Haramein.

La roue solaire et Atlantis
Bien avant que le nom d’Atlantide ne résonne, les peuples du Nord gravaient des roues solaires : croix cerclées, soleils aux rayons tournants, mandalas de pierre. Ils proclamaient : le monde est cercle. Tout part d’un centre, se déploie, revient.
Platon reprit ce schéma pour décrire Atlantis : une cité en cercles concentriques, temple et océan, reflet d’un ordre cosmique. Mais cette cité fut brisée.
Atlantis, la roue solaire et la théorie de Hapgood ne sont peut-être que des échos d’une seule vérité : il y eut un centre, englouti mais toujours présent dans les symboles.
Atlantis, miroir englouti
Atlantis n’est pas seulement un mythe de ruine et de chute. C’est le souvenir de la cité parfaite, centrée comme un soleil, mais brisée par l’orgueil. Elle incarne la mémoire d’un axe perdu, d’un pôle effacé.
La carte de Piri Reis, les cercles nordiques et la théorie des pôles errants ne sont peut-être que les reflets différents d’une seule vérité : il y eut un centre, et ce centre fut englouti. Mais il demeure dans les symboles, comme une clé invisible qui attend d’être retrouvée.


L’unité des cercles
Ce qui relie Piri Reis, Mercator, Hapgood et Atlantis n’est pas une preuve matérielle, mais une harmonie :
- la carte garde la mémoire des terres effacées,
- la théorie rappelle que la Terre est mouvante,
- les symboles enseignent que tout procède du cercle,
- le mythe révèle que tout cercle se brise… pour renaître ailleurs.
Au centre du centre
Le cercle est l’éternel langage. Dans sa ronde se trouvent l’origine et la fin, l’exil et le retour. Lire la carte de Piri Reis comme une relique géographique, c’est manquer son essence : elle est un miroir initiatique.
Elle nous dit qu’Atlantis vit encore, non pas dans les eaux ou les glaces, mais dans l’empreinte circulaire gravée dans notre mémoire spirituelle.
Elle dit qu’Atlantis vit encore, non pas dans les glaces ou les abysses, mais dans l’empreinte circulaire gravée en nous. Car chaque civilisation porte en elle son Atlantide, le cercle parfait et la chute inévitable.
Et chaque être humain porte sa carte secrète : une roue solaire intérieure, rappel qu’il existe toujours un centre à retrouver.
Cette conception rejoint à la fois :- La théorie de Hapgood : une lithosphère glissant soudainement sur l’asthénosphère, provoquant des basculements rapides des pôles et remodelant la surface du globe.
- La vision du tore planétaire : les pôles conçus comme de véritables cavités, portes d’aspiration et d’expiration, où circulent les flux énergétiques de la Terre.
- L’analogie de la peau d’orange : la croûte mouvante enveloppant un noyau vivant, happée et transmutée lorsqu’elle traverse le vortex polaire.
- Le Ginnungagap nordique : l’abîme originel, creuset où la roche devient matière initiée, marquée par la mémoire du champ magnétique.
- Le mythe d’Atlantis : une civilisation engloutie par le basculement des pôles, rappelant que toute grandeur est périssable.
- Les symboles solaires et celtiques : roue, croix et mandala, qui figurent ce cycle de circulation et de renversement autour d’un axe central.
- L’idée universelle du cercle : le monde comme un cycle ouvert, où destruction et renaissance se succèdent indéfiniment.
Conclusion
La théorie de Hapgood n’a jamais été adoptée par la science officielle, car elle contredit la tectonique des plaques. Pourtant, elle a le mérite d’ouvrir une brèche : imaginer la croûte terrestre comme une peau mobile, glissant sur un noyau vivant.
Si les pôles ne sont pas de simples points abstraits, mais des ouvertures réelles dans la géométrie de la planète, cavités du tore où circulent les flux magnétiques, alors chaque basculement devient plus qu’un accident géologique : une initiation terrestre. La roche y est brûlée, glacée, transmutée. Le champ magnétique agit comme un creuset, et la planète tout entière participe à une alchimie silencieuse.

C’est là que science et mythe se rejoignent. Les anciens parlaient de Ginnungagap, abîme originel. Platon évoquait Atlantis, engloutie par un renversement du monde. Les peuples du Nord gravaient la roue solaire, symbole de ce flux éternel.
Aujourd’hui, la géologie nous rappelle que la Terre bouge, que ses pôles dérivent, que ses champs fluctuent. La science mesure. Le mythe enseigne. Ensemble, ils disent la même chose : nous habitons une planète vivante, respirante, circulaire.
Ainsi, lire les cartes de Piri Reis ou de Mercator n’est pas seulement un retour vers des géographies perdues. C’est un miroir tendu vers nous-mêmes. Car chaque basculement du monde extérieur appelle un basculement intérieur. Et trouver le centre, c’est apprendre à rester debout, même lorsque la Terre elle-même se retourne.
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SUMARNOTTI accompagne la géométrie sacrée
Je suis heureuse de vous annoncer que le titre Sumarnotti a été choisi pour accompagner une série de vidéos réalisées par Eric Charpentier, auteur et conférencier passionné, autour de la géométrie sacrée des mégalithes de la Cham des Bondons, en Lozère.
Ce territoire fascinant, empreint de mystères et de présence, est l’un des hauts lieux mégalithiques d’Europe. Il porte en lui les traces d’une relation ancestrale entre l’humain, la terre et le cosmos — une sagesse ancienne inscrite dans la pierre.
Dans cette série de vidéos, Eric nous guide à travers une lecture sensible et inspirée de ces architectures du silence, révélant les liens subtils entre formes, fréquences, mémoire et sacré.
C’est un honneur que Sumarnotti, avec ses sonorités nordiques, ses accents rituels et son ambiance contemplative, puisse servir de fil conducteur sonore à ces explorations de l’espace, du temps et de la mémoire du monde.
La musique devient ici un vecteur de résonance pour accompagner cette démarche de reconnexion et de transformation…Le teaser de la série est désormais en ligne sur la chaîne YouTube fraîchement créée “Les Bâtisseurs du Sacré” :
Dix épisodes suivront au fil de l’été, jusqu’en septembre.Pour suivre le projet de plus près, un groupe privé Facebook vous attend : Les Bâtisseurs du Sacré – Facebook
Merci à Eric Charpentier pour sa confiance, et à toutes celles et ceux qui œuvrent à faire vibrer la mémoire du sacré dans nos paysages intérieurs et extérieurs.
Découvrez ou redécouvrez Sumarnotti par Kvervandi en streaming et à la vente sur les plateformes musicales:
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Les Tricksters et Révélateurs : Ceux qui font trébucher les héros pour mieux les élever
Introduction : Ces figures troubles qui éclairent l’ombre
Dans les grands récits mythologiques, on célèbre souvent les héros, les sages et les mentors. Mais qu’en est-il de ceux qui les mettent à l’épreuve ? Ceux qui les provoquent, les déstabilisent, les poussent dans leurs retranchements ? Ces personnages ambigus, parfois moqués, souvent redoutés, jouent pourtant un rôle essentiel :
Ce sont les tricksters, les révélateurs, les semeurs de chaos fertile.
Ils ne guident pas; ils déstabilisent.
Ils ne réconfortent pas; ils révèlent les failles.
Et sans eux, il n’y aurait tout simplement pas de transformation.À travers les mythes anciens et les récits modernes, cet article propose de plonger dans l’univers fascinant de ces figures troubles; qui, loin d’être des ennemis, sont peut-être les vrais artisans de la transformation.
Dans l’excellent série pop culture d’Alexandre Astier: Kaamelott, ces rôles sont incarnés par Méléagant et Morgane. Mais ils s’inscrivent dans une longue tradition mythologique : Loki, Hermès, Méphistophélès, tous partagent ce statut étrange de perturbateurs nécessaires.
Ce sont des forces initiatiques, des cailloux semés sur le chemin du héros pour le faire trébucher, et peut-être, enfin, regarder en lui-même.
Trickster vs Révélateur : deux visages d’une même fonction
Le Trickster : le perturbateur malin
Le trickster est une figure universelle du récit traditionnel. Il est celui qui ne respecte aucune règle, qui joue avec les limites, qui se rit des dieux et des hommes.
Parmi les plus connus, on trouve :- Loki dans la mythologie nordique : rusé, instable, à la fois complice et traître des dieux.
- Hermès chez les Grecs : messager, voleur, inventeur de la lyre, maître des passages et des métamorphoses.
- Coyote dans les traditions amérindiennes : à la fois héros et imbécile sacré.
- Anansi, l’araignée ouest-africaine, maître du mensonge et de la ruse joyeuse.
Leur but n’est pas de nuire, mais de déranger l’ordre établi pour provoquer un rééquilibrage, une révélation, une évolution.
Le Révélateur : celui qui dévoile les failles
Le révélateur, lui, est plus grave. Il n’invente rien, mais dévoile ce qui est déjà là : les fissures, les contradictions, les illusions.
Il agit par présence, par parole, par silence.Ce peut être :
- Méléagant, dans Kaamelott, incarnation du doute et du néant.
- Morgane, détentrice d’un savoir caché, qui vient ébranler les dogmes.
- Méphistophélès, qui ne tente pas Faust par le mal, mais par la vérité brutale.
Le trickster joue, le révélateur tranche. Mais tous deux mettent le héros en crise, car la chute est le début de la métamorphose.
Méléagant : de chevalier félon à figure du doute absoluDans la légende médiévale :
- Méléagant (ou Meleagant, Meleagans) est un chevalier félon dans Lancelot ou le Chevalier de la Charrette de Chrétien de Troyes (XIIe siècle).
- Il est le fils du roi Baudemagus, souverain du royaume de Gorre, un lieu mystérieux où les étrangers sont prisonniers.
- Il enlève la reine Guenièvre, ce qui lance Lancelot dans sa quête. Il incarne la violence désordonnée, l’anti-honneur chevaleresque.
- À la fin du récit, Lancelot le tue dans un combat symbolique : le chaos est vaincu par la fidélité à l’idéal.
Dans Kaamelott :
Il agit comme un prêtre noir du doute, opposé à la foi des chevaliers dans le Graal.
Alexandre Astier en fait une figure archétypale du vide intérieur, quasi démoniaque, hors du temps, qui se nourrit des failles intérieures des héros.
Il ne combat pas, il suggère, glisse dans l’ombre, désintègre les certitudes.
Il est une métaphore du désespoir moderne, un révélateur de vide spirituel.Dans Kaamelott, Méléagant est une création originale, inspirée d’un personnage secondaire de la légende arthurienne. Mais chez Alexandre Astier, il devient une entité quasi métaphysique, le révélateur du vide intérieur, l’homme en noir qui parle doucement pendant que le monde s’effondre.
Il ne frappe pas. Il fait douter.
Il ne condamne pas. Il suggère.
Il ne ment pas. Il propose des vérités insoutenables.
Il a aussi une forte résonance mythique avec Loki :
Et tous deux font basculer les héros dans l’autre face d’eux-mêmes.
Tous deux apparaissent quand l’équilibre est brisé.
Tous deux jouent avec le doute, déforment la réalité, exposent l’incohérence du monde.« Je suis là quand les hommes tombent. »
Face à lui, Lancelot perd ses repères, devient l’instrument d’un idéal corrompu. Arthur, lui, est poussé au bord de l’abîme, vidé de sa foi en la Quête, en les dieux, en lui-même.
Méléagant n’est pas « le Mal » au sens manichéen. Il est le trou dans la cuirasse, la fissure qui montre que le système est déjà en ruine. Il n’est pas un ennemi à vaincre. Il est une nécessité à traverser. Il ne crée rien — il révèle.
Morgane : sorcière lucide et l’éclaireuse du chaos

Morgan le Fay
Frederick Sandys (1829–1904)
Peintre préraphaélite britannique
1864Dans la légende médiévale :
- Morgane (ou Morgane la Fée) est souvent la sœur ou demi-sœur d’Arthur.
- Elle est formée à la magie par Merlin, et devient une femme savante, guérisseuse ou sorcière, selon les versions.
- Dans le Cycle de la Vulgate, elle est jalouse, manipulatrice, parfois bienveillante : une figure ambivalente du féminin.
- Dans certaines versions, c’est elle qui emmène Arthur à Avalon pour le soigner après la bataille finale de Camlann. Elle est alors gardienne du seuil, passeur entre les mondes.
Elle est donc ambivalente, à la fois sorcière et sauveuse, danger et salut.
Dans Kaamelott :

Morgan gives Arthur the fake Excalibur
Manuscrit médiéval enluminé
British Library MS 38117
British Library, LondresElle incarne la gardienne du savoir qu’on ne veut pas entendre, l’opposition à l’ordre masculin, tout en comprenant les mécanismes du pouvoir mystique. Elle sait que la Quête échouera. Elle connaît l’usure du système, l’échec programmé des hommes. Elle est Morgane, la sorcière lucide.
Elle est une figure du féminin sacré et dangereux, qui ne détruit pas, mais dévoile. À ce titre, elle se rapproche de la sorcière jungienne ou de l’anima inversée : celle qui incarne la connaissance refoulée.
Face à elle, Arthur doit douter. Et dans le doute, il peut commencer à se voir lui-même, au-delà de la fonction de roi.Elle représente le féminin archaïque, la sorcière détentrice du savoir caché, celle qui connaît les secrets de la Quête, les vérités que même Merlin tait.
Elle ne cherche pas à convaincre. Elle observe, met en garde, dévoile l’orgueil des hommes. Elle fait partie de ces figures qui rendent possible une autre lecture du monde — mais à un prix : abandonner la sécurité, les dogmes, les illusions.Comme Méléagant, elle n’est ni ennemie ni alliée. Elle est celle qui ouvre les yeux du héros… même si c’est douloureux.
Loki : le perturbateur divin
Dans la mythologie nordique :

Loki, le dieu nordique du chaos et du mensonge, tenant un filet de pêche. Extrait d’un manuscrit islandais du XVIIIe siècle, le SÁM 66, conservé à la Bibliothèque nationale et universitaire d’Islande (Landsbókasafn Íslands – Háskólabókasafn).
- Loki est le dieu du chaos, de la ruse et de la transformation.
- Il est à la fois ami et ennemi des dieux d’Asgard.
- Il est responsable de la mort de Baldr, l’un des dieux les plus aimés, et sera enchaîné jusqu’au Ragnarök.
- Mais il est aussi le père de créatures fondamentales comme Fenrir (le loup), Hel (la mort) et Jörmungandr (le serpent du monde).
- Il incarne la nécessité du désordre pour permettre au cosmos d’évoluer.
Fonction symbolique :
- Trickster par excellence, Loki fait sauter les barrières.
- Il révèle les hypocrisies des dieux, provoque, met à nu.
- Il n’est ni bon ni mauvais, mais inévitable : sans lui, pas de remise en question.
Hermès : le messager aux pieds ailés
Dans la mythologie grecque :
- Hermès est le messager des dieux, le dieu des voleurs, des voyageurs, des commerçants, des frontières et des passages.
- Il est aussi psychopompe : il guide les âmes vers l’au-delà.
- Dès sa naissance, il vole les troupeaux d’Apollon et invente… la lyre !
- Il est une figure de l’intelligence vive, du déplacement, du langage.
Fonction symbolique :
- C’est un trickster civilisé, celui qui brise les codes avec style.
- Il représente l’adaptabilité, la médiation, l’innovation.
- Contrairement à Loki, il n’est pas destructeur, mais recompose sans cesse le monde.
Le Trickster comme accoucheur d’âme
Tous ces personnages — Méléagant, Morgane, Loki, Hermès — partagent une fonction essentielle dans la structure du mythe : ils provoquent l’initiation.
Ils ne sauvent pas; ils mettent à l’épreuve.
Ils ne guident pas; ils ouvrent les yeux — même si cela fait mal.En ce sens, le trickster est un accoucheur d’âme. Il fait chuter, non pour punir, mais pour révéler ce qui dort en soi.
Sans lui, pas de métamorphose.Dans les récits initiatiques, le héros ne grandit pas grâce à la victoire. Il grandit en chutant, en se brisant, puis en se reconstruisant autrement. Méléagant et Morgane, comme Loki ou Méphistophélès, sont les figures de la crise, de la désintégration nécessaire à la transformation. Ils sont là pour accoucher l’âme du héros.
Carl Jung voyait dans ces figures des projections de l’ombre intérieure: ce que le héros refuse de voir en lui, jusqu’à ce que l’épreuve le force à regarder.
« On ne devient pas lumineux en imaginant des figures de lumière, mais en rendant l’ombre consciente. » – C.G. Jung
Conclusion : Trébucher pour se rencontrer
Et si le vrai mentor du héros… était celui qui le fait tomber ?
Celui qui l’oblige à se dépouiller de ses illusions, à traverser le feu intérieur ?
Dans les mythes, dans les contes, dans Kaamelott, la chute est souvent l’acte fondateur du héros véritable. Elle est un passage.
Et ceux qui provoquent cette chute — tricksters, révélateurs, sorciers, démoniaques ou lucides — sont les vrais moteurs de la transformation.Ils ne sont ni bons ni mauvais.
Ils ne sauvent pas, mais rendent la chute féconde.
Ils sont les cailloux sur le chemin, ceux sur lesquels on trébuche — pour enfin voir ce qu’on porte en soi.
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Le Manuscrit de Voynich : Une Alchimie de Mystères
Daté par le carbone 14 entre 1404 et 1438, le manuscrit aurait été rédigé en Europe, peut-être en Bohême ou en Italie du Nord. Il se compose de plus de 200 pages illustrées, organisées en plusieurs sections : botanique, astronomie, biologie, pharmacologie, et une mystérieuse partie « recettes ». Tous ces domaines sont typiques de la pensée alchimique, où le corps, la nature et les astres sont reliés dans une vision unifiée du monde.

Des Plantes Imaginaires aux Vertus Cachées
La section botanique du manuscrit montre des plantes composites, irréalistes, parfois même fantastiques. Ce style est cohérent avec les traditions hermétiques, dans lesquelles les plantes ne sont pas seulement médicinales, mais aussi symboliques. Chaque élément pourrait représenter une étape du processus alchimique ou un principe (soufre, mercure, sel) cher à la tradition.
Les Baignoires, ou les Mystères de la Dissolution
Une des sections les plus intrigantes du manuscrit montre des femmes nues immergées dans des sortes de bassins, reliés entre eux par des conduits sinueux. À première vue étrange, cette iconographie trouve un écho dans l’imagerie alchimique du bain de purification, étape clé du Grand Œuvre. Le corps y devient matière à transformer, purifié dans l’eau comme les métaux dans le creuset.

L’Astrologie : Chronomètre du Grand Œuvre

Les diagrammes astrologiques du manuscrit — cycles lunaires, zodiaques, configurations astrales, renvoient directement aux croyances alchimiques selon lesquelles chaque opération devait être effectuée sous une influence céleste précise. Le temps cosmique et les rythmes célestes guidaient le travail de l’alchimiste, comme les saisons rythment les cultures.

Une Écriture pour les Initiés
La langue du manuscrit, le fameux « voynichese », n’a jamais été déchiffrée. Plusieurs théories ont été avancées : code, langue artificielle, glossolalie structurée… Mais dans une logique alchimique, l’obscurité du texte n’est pas une erreur : elle est intentionnelle. Transmettre un savoir sacré supposait de le rendre inaccessible aux profanes. Comme les grimoires ou les textes kabbalistiques, le Manuscrit de Voynich serait une clé codée réservée aux initiés, voire un objet de méditation plus que de lecture linéaire.
Un Contexte Bouillonnant
L’Europe centrale du XVe siècle, notamment la Bohême, était un terreau fertile pour les arts occultes. Un siècle plus tard, l’empereur Rodolphe II (1552–1612) fera de Prague un foyer alchimique majeur, attirant les plus grands esprits de l’époque comme John Dee ou Edward Kelley. Le manuscrit pourrait provenir d’un courant précurseur de cette effervescence spirituelle, un héritage secret d’un savoir mystique en gestation.
Conclusion : Un Grimoire Alchimique du XVe Siècle ?
Le Manuscrit de Voynich n’est peut-être ni un canular, ni une langue oubliée. Il pourrait bien être un grimoire alchimique, codé dans un langage visuel et symbolique unique, destiné à préserver et transmettre des connaissances sacrées. Une œuvre de transformation, à la fois de la matière, de l’esprit et de celui qui ose tenter d’en percer le secret.
Pour aller plus loin :
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Rune & Sun: When the Sky Shapes the Runes
Astronomical Origin of Certain Runes: The Case of Kaunan and Jera
by Morgann' Gyger
The winter solstice has always been a pivotal moment in the solar year, associated with renewal rites and celestial observations. On December 21, 2020, a photograph taken in Dabouq (Amman, Jordan) by Zaid M. Al-Abbadi caught my attention. It depicted a series of 12 sunrises, captured at approximately 30-day intervals over the course of a year, from the winter solstice of 2018 to that of 2019. Upon analyzing this sequence, a recurring shape emerged – one that strikingly resembled a rune from the Elder Futhark.
The Image: Observing the Phenomenon

The image illustrates the angular variation in the position of the sunrise on the horizon throughout the months. Due to the tilt of the Earth’s axis, this movement follows a cyclical curve, with maximum amplitude at the solstices and minimal at the equinoxes.
Photo by: Zaid M. Al-Abbadi – Dabouq, Amman, Jordanie
Du solstice d’hiver 2018 à celui de 2019What immediately caught my eye was that the path traced by these 12 successive sunrises eerily resembled the sixth rune of the Futhark: « Kaunan » (or Kenaz).
Kaunan : Symbolism and Formal Correspondences
In the Elder Futhark, Kaunan is the sixth rune. It is generally interpreted as a symbol of controlled fire (torch), enlightening knowledge, or even creative intuition. Its shape, an open chevron, suggests a directional dynamic, oriented towards a source.The graphic similarity between the annual trajectory of the sunrise (according to the studied image) and this rune raises a hypothesis: the proto-Germanic peoples might have drawn inspiration from regular astronomical phenomena in the development of certain Futhark glyphs. This possibility warrants further exploration, in dialogue with research in archaeoastronomy.
Jera, the twelfth rune of the Futhark, is traditionally associated with the annual cycle (Jahr in German, year in English). It is represented by two curved or angular lines following each other symmetrically without touching, forming a dynamic rotational structure. This symbol, linked to agricultural cycles and seasonal fertility, seems to anchor itself in an astronomical reading of time.
Once again, the overlay between celestial movements and the shape of the glyph suggests an interpretative avenue: Jera could be a symbolic transcription of the entire solar annual cycle, with its 12 monthly phases represented by this double figure.
A Path for Study?
This intuitive observation, born from the intersection of astronomical photography and symbolic study of the runes, opens several avenues for reflection. It invites us to question the role of sky observation in the genesis of proto-historical alphabets, beyond their mere phonetic or magical function. The relationship between natural cycles (notably solar) and the development of ancient symbolic systems, including runic ones, deserves rigorous examination, intersecting:
- Symbolic anthropology (e.g., Mircea Eliade, Georges Dumézil),
- Archaeoastronomy (e.g., E.C. Krupp, Alexander Thom),
- Germanic philology and historical linguistics (e.g., R. Simek, E.O.G. Turville-Petre).
Conclusion
The correspondence between the annual solar variation and certain runic forms, notably Kaunan and Jera, may not be coincidental. If confirmed by further research, it would enhance our understanding of the runes as a symbolic system that integrates a sensitive and codified observation of the cosmos.
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ARCANE XV – LE DIABLE
Il n’est pas aisé de maitriser son « démon »
Il m’a fallu m’y reprendre à deux fois pour parvenir à capturer le Diable.
La première séance photo m’a fait vivre une véritable expérience mystique. Dans le ventre de la terre, les boyaux d’une caverne, je suivais ce cordon ombilical formé par les pas sûrs de mon précieux guide et les fins filaments de lumière émis par les torches de nos casques de spéléologie. C’est loin de la clarté du monde, éclairé de quelques bougies et torches, qu’a eu lieu la première tentative de capture de cet être souterrain.
Le manque de visibilité a rendu les images peu montrables, mais QUELLE EXPERIENCE!
Un connexion total à ses peurs, ses limites, sa curiosité, son feu intérieur et à des mémoires enfouies.
Deux ans après avoir digéré ce que je devais apprendre des entrailles de la terre, j’ai pu à nouveau rencontrer ce diable, qui m’a finalement laissé l’approcher.
Il n’est ni homme, ni animal, ni bon, ni mauvais. Il est le détenteur d’une force qu’il nous est offert de dompter.
Traverser en images les arcanes du Tarot est une voie vers sa compréhension; une manière de vivre ses archétypes dans sa propre chair.
Ce diable m’est apparu comme le « grand révélateur. » Cette force tellurique qui nous fait vivre intensément; ce pouvoir créateur qui parfois nous consume.
En résumer: celui qui enseigne à maitriser son feu.
Je me suis inspirée du Cernunnos du fameux chaudron de Gunderstrup, visible au musée national du Danemark, à Copenhague.
Plus d’info:
https://en.natmus.dk/historical-knowledge/denmark/prehistoric-period-until-1050-ad/the-early-iron-age/the-gundestrup-cauldron/the-gundestrup-cauldron-the-caldron-of-fate/ -
MEGALITHS, FORGOTTEN WORLD
Out now!
© Howard Crowhurst Written and directed by Howard Crowhurst, this film is the perfect introduction to his work.
It is now available for free on Howard Crowhurst YouTube channel.I was lucky enough to be able to take part in this project as a documentalist and open the door to an astonishing understanding of our history.

SYNOPSIS
Thousands of years ago, before the Romans, before the Greeks, even before the Old Kingdom of Egypt, an unknown people erected megalithic monuments on Earth.Their works span continents and millennia, leading us to believe that they were distinct, unrelated populations.
But the similarity of the techniques used, the architectural principles and the engravings and sculptures indicate a common thought. It’s by examining the astronomical alignments, the geometry and the measurements of these monuments that we can be sure that they are all part of the same culture.
This film will change the way we see ancient peoples, separated from our own time by millennia.
Are you prepared?

A new film project is coming!
«Megaliths, Forgotten World» is only the first part of a series of several opuses.
In his next film, «Megaliths, Unified World», Howard Crowhurst will take the audience on a tour around the globe to explore what knowledge and principles link monumental constructions of the ancient world.
Find out more about Howard’s work and books at : https://howardcrowhurst.com/books/
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L’ETOILE – THE STAR
Le 11 octobre 2022 Leyla et moi sommes parties rejoindre ce magnifique endroit, cher à mon coeur pour un après-midi photographique.
Nous avons longé la rivière du Nozon, pour rejoindre l’incroyable chute du Dard; lieu propice à mes rêveries fantasques, emplissant à chaque fois mon esprit de magie en symbolisant avec puissance et majesté les forces vives de la nature.
A peine arrivées nous remarquions un chamois, confortablement allongé sur la paroi, presque sous la chute. Il observait avec non-chalance notre installation.

Couverture de pique-nique, victuailles, matériel photo, 2 cruches et 10 mètres de voile blanc nous servaient d’équipement pour créer ce que j’avais en tête depuis un moment.
Je souhaitais créer ma version de l’arcane majeur du Tarot « L’étoile ».
Après avoir pris des forces en grignotant fromage et autres délices, nous drapions élégamment Leyla de son voile blanc et trouvions le meilleur angle à donner à cette image.
Certains codes symboliques et hermétiques étaient cependant à respecter; du moins ceux portés à ma connaissance, car il y aurait, bien certainement, beaucoup plus à dire et à découvrir.
Voici donc en image ma vision de l’Etoile:
XVII – L’ETOILE Une forte imagination produit l’événement
L’arcane XVII du tarot est porteuse d’un message particulièrement bénéfique. La carte met en scène une femme nue (j’ai préservé la pudeur de ma jeune modèle en l’enveloppent d’un voile), agenouillée au bord d’un cours d’eau. La jeune femme tient dans ses mains deux cruches. Le contenu de la première est calmement versé dans le cours de la rivière, témoignant par là même, des connexions qu’entretient le personnage avec le monde de l’intuition et des émotions; tandis que la seconde semble servir à fertiliser la terre nourricière.
Par ce geste simple, l’Etoile entretient le cycle immuable de la vie.
La jeune femme est couronnée d’une étoile principale à 8 branches, l’étoile des mages, considérée comme étant Sirius, elle-même entourée de 7 petites étoiles annexes représentant les 7 planètes sacrées des anciens.
Si on s’intéresse de prêt ou de loin à la symbologie, il est aisé de faire le lien en la présence de ces 8 étoiles avec la constellation du Grand Chien, dont l’étoile la plus brillante est Sirius. (Le mot « canicule » de « canis » signifiant chien, est issu du nom de cette constellation).
En Egypte l’apparition de cette étoile dans le ciel marquait la crue du Nil, ce qui nous renvoit immédiatement à Isis fertilisant les rives du fleuve.
L’oiseau présent en arrière plan est un Ibis, symbole du dieu Thoth, inventeur des arts, représentant la créativité qui provient des eaux de l’inconscient. Je l’ai voulu rouge sang, sang qui donne vie.
La jeune fille semble ne faire qu’un avec la rivière. Elle est le prolongement de la chute d’eau. Son voile flotte dans le courant pour en prolonger le mouvement et faire corps avec la source.
Pour le reste, l’image vous en racontera beaucoup plus et saura, je l’espère, parler à votre imagination.Mes remerciements à Leyla pour avoir incarné avec tant de grâce cet arcane, bravé l’eau très fraiche et apporté sa légendaire joie de vivre.




